dimanche 20 mai 2018

Lecture : Atomic (s)trip


J'ai eu l'heureuse bonne nouvelle d'être sélectionnée par la récente Masse Critique de Babelio et de recevoir ce recueil de manga de l'auteur Atsushi Kaneko, paru aux éditions PIKA Graphic.

Dans ce recueil, on retrouve plusieurs courtes histoires classées selon deux voies : les histoires parues dans le magazine Tattoo Girl(s) et qui n'avaient jamais été rassemblées en un seul volume, et les histoires du recueil précédemment édité Atomic ?

Toutes les histoires issues du magazine Tattoo Girl(s) racontent le tatouage d'une femme. Pourquoi l'une porte le tatouage d'un oiseau, comment l'autre explique son tatouage d'araignée, ou encore les mots gravés sur le revers de sa lèvre inférieure… Bien entendu c'est souvent glauque, marqué d'humour noir. Le fait même que ce soit court apporte encore plus d'intensité à l'histoire, tout comme sa chute qui, à la manière des nouvelles, catalyse toute la force de l'ensemble dans le seul but de provoquer un choc. On sent que la fin arrive mais on ne sait pas tout à fait comment elle va nous percuter. C'est tout l'intérêt de l'histoire courte.
Quant à celles de la seconde partie de l'époque Atomic ? elles me sont apparues plus violentes dans leur contexte et leur message. Là, c'est certain, elles percutent de plein fouet l'ordre établi ou même leur histoire raconte une réalité plus sombre. On va presque crescendo dans l'horreur et la violence et chaque fois, on se retrouve dérouté par la fin et l'ambiance. 

Je ne connaissais pas l'auteur ni son œuvre, et comme toujours j'ai pu découvrir un nouvel univers grâce à Babelio et aux éditeurs participants aux Masses Critiques. C'est très agréable d'être un peu bousculé dans nos habitudes de lecture et de se confronter à des ambiances ou des mondes que l'on n'aurait pas exploré sans qu'on nous y amène. Une très belle découverte donc, que je recommande, car cet auteur, par ses dessins très expressifs et bien léchés, nous montre une réalité noire sans pour autant basculé dans le gore total. De la retenue tout en maîtrisant ce rythme qui s'intensifie à mesure qu'on approche de la fin pour terminer sur un bouleversement surprenant, l'auteur est un maître dans l'art du manga court et percutant. 
À lire, qu'on soit amateur ou non de ce type de nouvelles graphiques.


mercredi 16 mai 2018

Lecture : Celle qui n'avait pas peur de Cthulhu


Heureuse sélectionnée au dernier Masse Critique des littératures de l'imaginaire, j'ai reçu ce roman de Karim Berrouka. Rien que le titre en dit long sur la lecture…

Ingrid est abonnée aux types barjos : que ce soit son dernier petit ami en date ou le gars qui s'est assis juste à côté d'elle dans le métro. Mais ce qui est troublant c'est qu'ils sembleraient tous deux d'accord sur leur élucubrations : elle est le Centre du pentacle. Vaste programme. Seulement, quand la police vient la chercher chez elle et la soumet à un interrogatoire serré en pleine nuit, quand des gens encore plus bizarres s'adressent à elle et lui offrent des voyages en Grèce ou à Vienne pour rencontrer leur groupe, quand le type du métro lui offre du caviar et des liasses de billets pour qu'elle s'intéresse un peu à Lovecraft, ça commence à faire beaucoup, non ? Et si Howard Philipps n'avait pas écrit que des conneries…

Ingrid est un personnage on ne peut plus attachant : elle est hermétique à toute forme de spirit et sensible uniquement à un bon verre de bière. Elle est intelligente et pleine d'humour, mais elle a la poisse et n'attire que les cas. Bref, c'est notre meilleure amie, celle qui nous raconte toujours des trucs incroyables. Oui mais là, c'est bien plus que des trucs incroyables, et malgré le ton très détaché qu'elle prend au début, on commence à croire comme elle que tout n'est pas qu'inepties. Les sectes d'accord, les gens bizarres ok, mais les monstres et les statuettes qui prennent vie, c'est quand même autre chose.
Cet humour mêlé à l'aventures et au surnaturel, c'est tout ce que j'aime. C'est parfait pour passer un excellent moment et pour nous donner envie de s'y replonger, dans Cthulhu. Car même si elle se frotte dangereusement à des êtres effroyables, il manque l'angoisse à ce roman pour en faire un digne successeur de Lovecraft. Et je ne pense pas que c'est là ce que souhaite l'auteur. Il cherche plutôt à reprendre à son compte ce monde incroyable pour le modeler à sa sauce. Ce qui donne un résultat surprenant et très sympa. Car là où il manque l'angoisse lovecraftienne, il y a par contre l'humour totalement absent chez le maître. Une compensation qui amène Cthulhu et ses potes dieux anciens sur des chemins différents qu'on explore avec avidité. On tourne les pages sans compter, on veut savoir ce qui nous arrive, enfin, ce qui arrive à Ingrid, comment elle va se sortir de l'orgie démoniaque en Grèce, ou de bien d'autres péripéties. Très vite, on est à ses côtés, à se dire que c'est quand même terrible ce qui lui tombe dessus, et que ce bon Lovecraft n'était pas si fou (ou alors on l'est aussi). On y croit, on se dit que ça va finir comme ça doit finir, mais on est quand même un peu surpris par la fin. Pour ma part, je ne m'attendais pas à ce que ça se termine ainsi.
Une très bonne surprise que ce roman sans prétention qui, sous ses airs de roman léger, est une excellente incursion dans l'univers de Lovecraft. Karim Berrouka connaît parfaitement son sujet, et décide de nous prendre par la main et de nous montrer une autre façon de voir le tableau terrifiant, par une lorgnette plus décalée. À lire !