mercredi 16 mai 2018

Lecture : Celle qui n'avait pas peur de Cthulhu


Heureuse sélectionnée au dernier Masse Critique des littératures de l'imaginaire, j'ai reçu ce roman de Karim Berrouka. Rien que le titre en dit long sur la lecture…

Ingrid est abonnée aux types barjos : que ce soit son dernier petit ami en date ou le gars qui s'est assis juste à côté d'elle dans le métro. Mais ce qui est troublant c'est qu'ils sembleraient tous deux d'accord sur leur élucubrations : elle est le Centre du pentacle. Vaste programme. Seulement, quand la police vient la chercher chez elle et la soumet à un interrogatoire serré en pleine nuit, quand des gens encore plus bizarres s'adressent à elle et lui offrent des voyages en Grèce ou à Vienne pour rencontrer leur groupe, quand le type du métro lui offre du caviar et des liasses de billets pour qu'elle s'intéresse un peu à Lovecraft, ça commence à faire beaucoup, non ? Et si Howard Philipps n'avait pas écrit que des conneries…

Ingrid est un personnage on ne peut plus attachant : elle est hermétique à toute forme de spirit et sensible uniquement à un bon verre de bière. Elle est intelligente et pleine d'humour, mais elle a la poisse et n'attire que les cas. Bref, c'est notre meilleure amie, celle qui nous raconte toujours des trucs incroyables. Oui mais là, c'est bien plus que des trucs incroyables, et malgré le ton très détaché qu'elle prend au début, on commence à croire comme elle que tout n'est pas qu'inepties. Les sectes d'accord, les gens bizarres ok, mais les monstres et les statuettes qui prennent vie, c'est quand même autre chose.
Cet humour mêlé à l'aventures et au surnaturel, c'est tout ce que j'aime. C'est parfait pour passer un excellent moment et pour nous donner envie de s'y replonger, dans Cthulhu. Car même si elle se frotte dangereusement à des êtres effroyables, il manque l'angoisse à ce roman pour en faire un digne successeur de Lovecraft. Et je ne pense pas que c'est là ce que souhaite l'auteur. Il cherche plutôt à reprendre à son compte ce monde incroyable pour le modeler à sa sauce. Ce qui donne un résultat surprenant et très sympa. Car là où il manque l'angoisse lovecraftienne, il y a par contre l'humour totalement absent chez le maître. Une compensation qui amène Cthulhu et ses potes dieux anciens sur des chemins différents qu'on explore avec avidité. On tourne les pages sans compter, on veut savoir ce qui nous arrive, enfin, ce qui arrive à Ingrid, comment elle va se sortir de l'orgie démoniaque en Grèce, ou de bien d'autres péripéties. Très vite, on est à ses côtés, à se dire que c'est quand même terrible ce qui lui tombe dessus, et que ce bon Lovecraft n'était pas si fou (ou alors on l'est aussi). On y croit, on se dit que ça va finir comme ça doit finir, mais on est quand même un peu surpris par la fin. Pour ma part, je ne m'attendais pas à ce que ça se termine ainsi.
Une très bonne surprise que ce roman sans prétention qui, sous ses airs de roman léger, est une excellente incursion dans l'univers de Lovecraft. Karim Berrouka connaît parfaitement son sujet, et décide de nous prendre par la main et de nous montrer une autre façon de voir le tableau terrifiant, par une lorgnette plus décalée. À lire !

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire